par Laura Carolina Silva Aya
Publié par the Graduate Press en anglais, le 7 octobre 2020
Le 27 septembre, la Suisse a organisé un référendum fédéral pour déterminer certains initiatives politiques – notamment le congé de paternité, les modifications des lois sur la chasse et si la Suisse doit maintenir son accord avec l’UE pour permettre la libre circulation des personnes à travers les frontières. A travers le système démocratique directe de la Suisse, cette dernière « Initiative de limitation » a proposé d’annuler l’accord avec l’UE afin d’imposer des restrictions strictes à l’immigration. Après une longue campagne, l’initiative a été rejetée par 62% des électeurs. Les cantons du Tessin, de Schwyz, de Glaris et d’Appenzell Innerhodes ont été les seuls à voter en faveur de la proposition.
L’initiative a été lancée par le Parti populaire suisse, également connu sous le nom d’Union démocratique du centre (UDC), un parti conservateur d’extrême droite. Les membres estiment que l’immigration « incontrôlée » a exercé trop de pression sur les salaires individuels, la souveraineté suisse et les systèmes de protection sociale à travers le pays, tout en provoquant la pauvreté et le chômage. Bien que la rhétorique entourant le vote ait été formulée en termes de protection des travailleurs suisses, certains considèrent l’initiative comme une réponse xénophobe et nationaliste à la présence de travailleurs étrangers « indésirables » en Suisse.
En effet, ce n’est pas la première fois que ce secteur politique tente cette question. Cette campagne essayait de reproduire le succès d’un référendum similaire pour freiner l’immigration en 2014. Celui-ci visait introduire des quotas pour les immigrés de l’UE. Toutefois, précisément parce que l’accord autorisant la libre circulation des personnes était en vigueur, la proposition ne pouvait pas être appliquée.
Par contre, les opposants à l’initiative ont considéré que les inconvénients de l’initiative était trop nombreux en vue des avantages, car les répercussions économiques de la détérioration des relations avec l’UE (le partenaire commercial plus important de la Suisse) seraient trop graves. En plus, l’opposition soutenait que la limitation de la mobilité transfrontalière mettrait en danger les droits des citoyens suisses de vivre et de travailler en Europe. Bien que la Suisse ne soit pas membre de l’UE, elle a signé une série d’accords avec l’UE qui lui donnent accès au marché européen. C’est la raison pour laquelle les citoyens suisses peuvent vivre, travailler et étudier dans l’UE tandis que les citoyens européens peuvent faire la même chose en Suisse.
Il faut comprendre que le referendum s’agissait d’un vote « absolu ». C’est à dire, parce que l’accord sur la libre circulation fait partie d’un ensemble d’accords avec l’UE, en se retirant de celui-ci, la Suisse aurait rendu nul l’ensemble des accords – isolant ainsi sérieusement le pays et affectant ses relations avec l’UE dans tous les catégories.
L’engagement des étudiants plus près de chez nous
Même s’il s’agissait d’une question nationale, plus près de chez nous, la proposition aurait sérieusement impacté la vie de nombreux étudiants, membres du personnel et membres du corps professoral de l’Institut. Les personnes qui vivent, travaillent, et voyagent en France auraient été confrontées à une instabilité juridique, politique et économique. Sans aucun doute, l’initiative aurait touché beaucoup plus les citoyens suisses et européens – mais elle aurait également eu un impact négatif sur la communauté IHEID dans son ensemble, en raison de que de nombreux individus dépendent des biens et services fournis en France ou en Europe.
Et pourtant, malgré la magnitude des répercussions potentielles du vote, ainsi que le débat substantiel qui se déroulait dans la vie publique suisse, il y a eu un manque notable de discussion à l’IHEID dans les mois et les semaines qui ont précédé le vote. Il n’y a eu aucune communication officielle de la part de l’administration ni des représentants du corps étudiant concernant le vote. Il est compréhensible que les parties concernées ne voulussent pas exprimer une position concernant la politique nationale ; cependant, certains étudiants ont estimé qu’il aurait dû y avoir un dialogue sur la question, en vue du fait que nombreux étudiants, professeurs et membres du personnel auraient été confrontés à l’incertitude quant à leur avenir à l’Institut.
La question a finalement été portée à l’attention du GISA et du corps étudiant grâce aux efforts de Matthieu Guillier, étudiant de deuxième année au MIA. Dans les semaines précédant le référendum national, Matthieu a présenté une motion au conseil d’administration de GISA et a recueilli les signatures nécessaires afin de déclencher un vote des étudiants sur la déclaration suivante :
« Le GISA s’oppose formellement à l’Initiative de Limitation et encourage vivement ceux qui sont en mesure de voter au référendum du 27 septembre à refuser les changements proposés »
– Graduate Institute Student Association (GISA)
En expliquant sa motivation pour faire avancer la question, Matthieu a dit : « I saw this ad [of] the person sitting on Switzerland. And I realized I didn’t know about it, and I knew that lots of people didn’t really know about it either. Usually the IHEID community is quite vibrant in terms of discussions, and I felt like I hadn’t heard of it anywhere. So what bothered me was the fact that this vote had the potential to have far-reaching implications for all of us at the Institute, and no one was really talking about it.”
Préoccupé, il était déterminé à porter la question à l’attention du corps étudiant de l’IHEID – non seulement pour augmenter la visibilité de l’initiative par rapport aux étudiants qui n’étaient pas au courant de ce qui se passait, mais aussi pour inciter ses collègues suisses à réfléchir sur leur position personnelle : « For me, it was especially about encouraging those who could vote, to go vote. I mean, I personally amcagainst the initiative, but I consider it even more important to create discussion and conversation »
Les efforts de Matthieu ont certainement porté leurs fruits. GISA s’est officiellement opposée à l’Initiative de Limitation, avec 93% des étudiants ayant voté approuvant la déclaration. En plus, The Graduate Press a également publié des informations sur le vote afin d’informer les étudiants, ainsi qu’une déclaration exprimant la forte opposition du comité éditorial à l’initiative.
Finalement, le rejet de l’initiative a signifié un maintien de la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’UE et un renforcement (symbolique) des relations entre les deux. Cependant, pour Matthieu, l’élément le plus important était d’encourager ses camarades à rester engagés. Il a déclaré qu’au vu des récents développements politiques dans le monde, il ne suffit pas d’espérer que les choses iront bien : « We’re not in an era when passivity and thinking that everything will go well is a good political position. I guess what I want my message to be: Go vote. Stay engaged »
C’est un message qui a déjà et continuera sûrement de résonner auprès des étudiants de l’IHEID.
Image d’en-tête par Anne Lee Steele.
Images incorporées par Sandra Silva.
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